Road trip en Tasmanie - première partie
Un peu plus petite que l’Irlande, l’île de Tasmanie possède néanmoins une incroyable diversité de paysages. J’y ai passé deux semaines à bord de mon van en janvier 2018, avec l’impression de passer en quelques kilomètres du Canada à la Bretagne, de la Suisse au sud de la France, tout en restant toujours résolument ancré en Australie ! Entre nature, histoire, culture et gastronomie, voici la première partie du récit de ces quinze jours de road trip inoubliables. Et si vous comptez voyager à votre tour en Tasmanie, cet article et le suivant vous aideront à planifier votre itinéraire : retrouvez y tous mes bons plans sur les activités immanquables tout autour de l’île, et ma liste des meilleurs spots pour passer la nuit en van gratuitement !
Sommaire de la première partie
Un peu d'histoire
Saviez vous que la Tasmanie était autrefois reliée à l’Australie ? Elle est devenue une île il y a « seulement » 10 000 ans, à la fin de la dernière ère glaciaire ! Les Aborigènes, premiers habitants du continent, sont ainsi arrivés à pied il y a environ 40 000 ans. Pour voir la première trace d’un Européen, il a fallu attendre 1642 et le navigateur néerlandais Abel Tasman. Il appela ces nouvelles terres « Van Diemen’s Land » en l’honneur d’Anthony Van Diemen, gouverneur général des Indes orientales qui l’avait envoyé explorer cette partie du monde. Le nom fut changé en Tasmanie en 1856.
La colonisation européenne de la Tasmanie commença au tout début du 19e siècle. Craignant que les Français ne s’y installent, le gouverneur britannique de la Nouvelle Galles du Sud (à l’époque la seule implantation européenne en Australie) décida d’y envoyer une expédition. Hobart fut fondée en 1804, ce qui en fait la deuxième plus ancienne ville du pays après Sydney. Vous en apprendrez plus sur ces premiers colons à la fin de cet article !
Aujourd’hui, la population de Tasmanie s’élève à plus de 500 000 personnes. C’est une destination de vacances très prisée des Australiens. Le meilleur moment pour s’y rendre est pendant l’été austral, entre décembre et février ; idéalement fin janvier lorsque les vacances scolaires australiennes se terminent et que la plupart des familles rentrent à Melbourne ou Sydney. C’est aussi une destination hivernale populaire avec quelques stations de ski, mais je n’ai pas eu l’occasion de découvrir cet aspect de l’île !
Infos pratiques avant de partir
Il existe deux options pour se rendre en Tasmanie depuis le continent australien : l’avion (les principaux aéroports se trouvent à Hobart au sud et à Launceston au nord) ou le ferry entre Melbourne et Devonport sur la côte nord de l’île. C’est cette option que j’ai choisi : la traversée dure environ neuf heures et peut s’effectuer de jour ou de nuit, mais dans ce cas il faut inclure le prix d’une cabine. Avec un peu de chance vous verrez peut-être des dauphins sauter dans les vagues autour du bateau !
La Tasmanie est soumise à une très stricte quarantaine : chaque véhicule sera examiné avant d’embarquer, et il est formellement interdit d’amener des fruits frais, des légumes, du miel, du poisson… (liste complète des produits acceptés ou interdits en anglais). Cela permet d’éviter que des maladies se répandent sur l’île, qui est très fragile d’un point de vue écologique. La population de son animal fétiche, le diable de Tasmanie, a ainsi été réduite de 70% ces 30 dernières années à cause d’une tumeur faciale, et le tigre de Tasmanie est éteint depuis 1936.
Prévoyez au moins deux semaines si vous voulez faire le tour de l’île, mais un mois entier ne serait pas de trop tant il y a d’endroits magnifiques à visiter ! C’est le paradis des randonneurs : il y a des sentiers partout et le service des Parcs et de la Faune sauvage de Tasmanie a établi une liste des 60 plus belles balades de l’île (« 60 Great Short Walks« , lien en anglais, pdf téléchargeable ici – j’indiquerai le numéro de chacune d’entre elles quand j’y ferai référence). Bon à savoir également : l’entrée des Parcs Nationaux est payante et très chère. Vendu 89.50$ par véhicule (prix en août 2023), le « Holiday Pass » valable deux mois et qui donne accès librement à tous les Parcs est bien plus avantageux.
Enfin, pour en savoir plus sur les spécificités de la vie en van en Australie, n’hésitez pas à consulter mon article dédié !
Le nord-est de la Tasmanie
Je suis arrivé par le ferry à Devonport le soir du 19 janvier 2018. Au cours de la traversée, j’ai sympathisé avec deux Estoniennes, Karin et Marian, et un Belge, Sjoerd, et nous nous sommes mis d’accord pour voyager ensemble quelques jours. Pour sceller cette amitié naissante, notre première balade le lendemain fut pour découvrir quelques-uns des nombreux domaines viticoles du nord de la Tasmanie ! Il y en a plusieurs notamment à l’est de Devonport, près de la rivière Tamar, et la plupart proposent des dégustations gratuites, dont nous avons bien profité. Mon préféré : Holm Oak, un vignoble pas très facile à trouver un peu à l’écart de la route principale mais produisant d’excellents vins. Attention toutefois à ne pas oublier l’adage : boire ou conduire, il faut choisir !
Après cette agréable introduction, nous avons fait un crochet par George Town à l’embouchure de la rivière Tamar, la deuxième plus ancienne colonie de Tasmanie et la troisième plus ancienne ville d’Australie puisqu’elle a été créée peu de temps après Hobart en 1804. La vue depuis le phare de Low Head tout au bout de la route était jolie, et nous avons aussi au passage fait une rencontre surprenante avec un pingouin à l’air un peu revêche !
Le lendemain, nous avons continué vers l’est en passant par la cascade de St Columba (rando n° 49) ; avec ses 90m c’est l’une des plus hautes de Tasmanie. Les quelques heures de route jusqu’à la côte nous ont ensuite donné un bon aperçu de l’extraordinaire diversité de l’île : collines verdoyantes, vastes prairies, et même les restes de la forêt tropicale qui recouvrait autrefois toute l’île.
Nous avons fini par atteindre la splendide Bay of Fires sur le littoral nord-est de l’île. Son nom ne vient pas des lichens rouges et orangés qui recouvrent les rochers, mais des feux que les aborigènes allumaient près du littoral et que les explorateurs européens voyaient depuis leurs bateaux quand ils naviguaient au large. C’était mon coup de cœur de ce début de road trip : j’ai beaucoup apprécié le cadre magnifique et apaisant de ces petites criques et plages désertes.
- Pour aller plus loin et où dormir
A l’est de Launceston, le Parc National de Ben Lomond est constitué d’un plateau d’une altitude d’environ 1300m, avec un sommet qui culmine à 1572 m (Legges Tor, le deuxième point le plus élevé de Tasmanie). Les possibilités de promenade y sont nombreuses !
A mi-chemin entre George Town et Launceston se trouve Lilydale où vous aurez accès à un joli freecamp. Sur place, un espace grillades abrité, des toilettes et même une cheminée pour faire du feu, et à tout juste 10 minutes à pied deux jolies petites cascades. Et puis vous aurez peut-être la chance d’assister à un coucher de soleil aussi spectaculaire que celui auquel nous avons eu droit !
Au niveau de la Bay Of Fires, juste au-dessus de Binalong Bay se trouvent plusieurs campings rudimentaires, tous gratuits mais aussi très prisés. Nous y étions en haute saison et il nous a fallu un moment pour trouver une place, mais nous avons fini par dénicher une place au bord de la plage, où nous nous sommes endormis bercés par le bruit des vagues…
La côte est et le Parc National de Freycinet
Après la Bay of Fires, nous avons longé la côte vers le sud sur une route splendide, avec de nombreux points de vues magnifiques en chemin. Nous avons fait halte l’après-midi dans la petite ville de Bicheno pour y observer des « blow holes« , des trous dans les rochers où les vagues s’engouffrent pour former de véritables geysers. Toujours à Bicheno, nous nous sommes promenés sur la plage jusqu’à l’île de Diamond Island, reliée à la terre ferme à marée basse (attention, les courants sont puissants et très dangereux à marée haute !). Nous y avons croisé un local qui nous a pris en sympathie et proposé de venir prendre l’apéritif chez lui ; finalement la soirée s’est prolongée très tard et il a nous a carrément invités à rester camper dans son jardin, ce qui semblait visiblement agacer son épouse…
Nous ne nous sommes pas attardés le lendemain matin, à la fois pour éviter d’occasionner une scène de ménage, mais aussi parce que nous voulions arriver le plus tôt possible au Parc National de Freycinet un peu plus au sud. C’est l’un des lieux les plus touristiques de Tasmanie et les places de parking y sont rares ! La popularité du Parc est surtout due à la très belle Wineglass Bay, littéralement la « Baie du Verre de Vin » : vue du ciel, sa forme arrondie suggère celle d’un verre à pied… On peut accéder à un superbe point de vue par un sentier en aller-retour (rando n°55), mais nous avons opté pour une boucle plus longue (11km, 4h environ, rando n°56) passant au milieu de paysages magnifiques et au cours de laquelle nous avons croisé quelques « habitants » du Parc !
Toujours dans l’enceinte du Parc, nous avons aussi fait un crochet par Honeymoon Bay puis par le phare du Cap Tourville, là encore avec des panoramas de toute beauté…
…et puis c’est là que nos routes se sont séparées : Karin, Marian et Sjoerd voulaient rester une journée de plus dans la région, tandis que je poursuivais ma route seul vers le sud et la Péninsule de Tasman, à nouveau sur une « scenic road » le long de la côte entre Freycinet et Orford !
- Pour aller plus loin et où dormir
Si une journée suffit à avoir un bel aperçu du Parc National de Freycinet, il est aussi possible d’y rester plus longtemps pour parcourir les 30km du circuit de la Péninsule de Freycinet (lien en anglais). Un autre point de vue sur Wineglass Bay est également accessible au sommet du Mont Amos, mais le sentier qui y mène est très raide et s’apparente plus à de l’escalade à certains endroits.
Juste avant Orford, prenez le ferry à Triabunna pour vous rendre sur Maria Island. Le ferry ne prend que des piétons et des cyclistes car les voitures sont interdites sur l’île, qui est en même temps un Parc National. Vous pourrez y visiter l’ancienne colonie pénitentiaire de Darlington, inscrite au Patrimoine Mondial de l’Unesco, et y observer de nombreux animaux sauvages. Trois des « Great Short Walks » se trouvent sur cette île, les numéros 58, 59 et 60.
Pour dormir, vous pouvez faire comme moi et essayer de rencontrer un habitant de Bicheno qui vous invitera peut-être à passer la nuit dans son jardin ! Il existe sinon plusieurs freecamps proches du Parc National de Freycinet, une bonne option pour y être le plus tôt possible.
La Péninsule de Tasman
C’est probablement la région de Tasmanie que j’ai préférée tant les paysages y étaient spectaculaires ! Premier aperçu avant même d’arriver sur la péninsule, avec la vue sublime sur Pirates Bay depuis le Tasman Lookout, juste en amont de l’isthme d’Eaglehawk Neck qui la relie au reste de l’île.
En contrebas de ce point de vue, j’ai été saisi par la beauté géométrique des « Tesselated Pavements ». Une forme très rare d’érosion a créé ici des motifs parfaitement réguliers mais entièrement naturels : la main de l’homme n’y est pour rien ! Attention, cet endroit n’est visible qu’à marée basse.
Juste après Eaglehawk Neck, j’ai pris à gauche pour admirer deux autres sites naturels : la très impressionnante Arche de Tasman dont on se demande comment elle peut tenir debout, et les hautes falaises de Devil’s Kitchen, la Cuisine du Diable, au fond de laquelle viennent se fracasser les vagues dans un buit inquiétant…
J’ai ensuite continué ma route vers le sud de la Péninsule, en contournant dans un premier temps le site historique de Port Arthur. Je me suis d’abord arrêté pour visiter la grotte de Remarkable Cave, pas si remarquable mais dans laquelle on peut entrer à marée basse, puis j’ai poursuivi sur une piste en gravier pendant une dizaine de kilomètres jusqu’au point de départ de ma randonnée préférée de mon séjour en Tasmanie, celle conduisant au Cap Raoul, point le plus méridional de la Péninsule de Tasman (14km aller-retour, 4 à 5 heures, rando n°6). Entre points de vue à couper le souffle, falaises à pic et colonie de lions de mer, cette promenade mérite vraiment largement le détour !
Le jour suivant, je suis revenu en arrière pour visiter le site historique de Port Arthur, un incontournable de la Tasmanie (également inscrit au Patrimoine Mondial de l’Unesco). Entre les années 1830 et 1860, des centaines de condamnés furent envoyés dans cette colonie pénitentiaire où les conditions de vie étaient particulièrement rudes. Très peu eurent la chance de rentrer chez eux… L’entrée n’est pas donnée (47$, prix en août 2023) mais elle permet de se promener librement entre plusieurs dizaines d’anciens bâtiments très bien préservés. Une visite passionnante, et j’ai beaucoup apprécié en apprendre plus sur l’histoire des premiers colons européens en Tasmanie !
Et puis dans l’après-midi j’ai visité un second site historique au nord-ouest de la Péninsule, gratuit celui-là : d’anciennes mines de charbon. Là encore, les vestiges permettent d’imaginer les conditions extrêmement précaires dans lesquelles les détenus devaient travailler… La rando n°2 permet d’en faire le tour.
Pour finir, j’ai repris la route le soir même pour me diriger vers Hobart, à une heure et demie de trajet environ… mais je vous en parlerai en détail dans la seconde partie de cet article !
- Pour aller plus loin et où dormir
Amateurs de randonnée haut de gamme, la « Three Capes Track » (Chemin des Trois Caps) est faite pour vous ! Pour parcourir ce sentier inauguré en 2015, il vous faudra débourser pas moins de 595$ (prix en août 2023), sans oublier de réserver longtemps en avance car les places sont limitées. Ce prix inclut une entrée sur le site historique de Port Arthur, où un bateau viendra vous chercher pour une croisière d’une heure et quart puis vous déposera au début des 48km de sentier. Il s’effectue en 4 jours, avec trois « gîtes » très confortables sur le parcours et un trajet en bus également compris dans le prix total pour vous ramener à Port Arthur à l’arrivée !
Pendant mon road trip en janvier 2018, j’avais passé une nuit sur un petit camping très agréable juste à côté du sentier du Cap Raoul, le Raoul Bay Retreat, à seulement 10$ la nuit, sauna compris pour récupérer de la randonnée ! Malheureusement je découvre qu’il a fermé définitivement en 2020, je n’ai donc pas de bon plan camping à partager pour cette partie de la Tasmanie.
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